Roman
Juillet 1836 : La dernière chaîne de bagnards quitte Paris à destination de Brest. Les plus vils criminels sont de cet interminable voyage à pied, tel François Martin, complice de Lacenaire, ou Jean-Baptiste Delacollonge, ce curé de village qui a étranglé sa maîtresse et dépecé son cadavre. Dans leurs rangs se mêlent aussi des coquins de moindre envergure et quelques pauvres hères jetés là par des juges implacables. Enchaînés les uns aux autres comme des bêtes fauves, ces misérables forment un long cortège de damnés que Dante eut pu décrire.
Isidore, un enfant de quatre ans, les regarde passer dans la campagne normande et prend peur quand l’un d’eux, un géant roux, lui montre le poing et rugit : « Gare à toi, petit sacripant ! Dis bien tes patenôtres, soir et matin, si tu ne veux pas nous suivre en Enfer ! »
À l’âge d’homme, Isidore connaîtra l’horreur de la Guyane, prisonnier d’une terre sauvage peuplée de créatures féroces et mystérieuses. « Bienvenue sur l’île du Diable ! » ricane un lépreux d’une voix lugubre, dévoilant du bout de sa torche de résine enflammée les faces exsangues, horribles à voir, de ses compagnons de malheur qui se meuvent dans les ténèbres comme autant de non-morts.