Essai
Le XIXe siècle est la période fondatrice du fantastique irlandais — C. R. Maturin, J. S. Le Fanu, Bram Stoker — qui demeure une force vive de la fiction contemporaine : les plus grands auteurs puisent dans les ressources du « gothique » de la tradition.
De son côté, Joyce est, pour beaucoup d’entre eux, comme « le spectre du père », et les mythes anciens trouvent une nouvelle vie. Enfoui dans le sol, le passé est réveillé et ce « revenant » vient assurer la continuité de l’histoire sous de nouveaux avatars, pour le meilleur ou pour le pire. Les traumatismes majeurs (la Famine, l’Exil) s’expriment en d’angoissantes épopées individuelles ou collectives sous le ciel sévère de l’Irlande ou de l’Atlantique. L’autre et le double fissurent le présent et le vampire prend les habits du pervers dans un univers urbain souvent méconnaissable.
La compréhension de notre monde exige sans doute l’émergence d’un nouveau langage, où les mots s’agenceraient selon « une nécessité inimaginable ».
Claude FIEROBE, professeur honoraire de littérature anglaise à l’Université de Reims, a été président de la SOFEIR (Société Française d’Études Irlandaises) pendant neuf ans. Il a écrit de nombreux articles sur le roman gothique et la littérature irlandaise et a traduit des auteurs irlandais : C. R. Maturin, John Banim, J. C. Mangan, W. Carleton, Fitz-James O’Brien, Bram Stoker, W. B Yeats, Julia O’Faolain, Kate Cruise O’Brien, Seamus Heaney. Il est un collaborateur régulier de La Quinzaine Littéraire.